dimanche 23 octobre 2016

Shawn Phillips : "faces"


Légère entorse sur les principes pour ce disque de Shawn Phillips. C'est en effet un disque que j'ai choisi parce que je connaissais le musicien. Mais je ne le connaissais que parce que j'avais chiné au hasard son album "second contribution" quelques mois auparavant, sur la foi de la superbe pochette où on le voit vêtu d'une cape noire, cheveux blonds aux épaules, avec en mains une superbe 12 cordes Gibson... La vendeuse ne se souvenait plus de la musique, le disque n'était pas cher, il me permettait de faire baisser le prix d'un lot, je l'ai mis sous le bras et suis rentré avec... Ce disque m'avait fait forte impression, notamment le morceau "woman". Quand "Faces" s'est présenté à moi je n'ai pas hésité. 

Cet album n'est pas une compilation mais est cependant composé d'enregistrements faits à diverses périodes, dont certains sont sortis auparavant sous d'autres versions. C'est le cas de "L ballade" que j'ai choisi de présenter ici. C'est d'ailleurs pour cette chanson, dans cette version-là, que je publie ce post. La version précédente était parue sur "Contribution", et elle se trouve en fouillant bien sur le net. Mais la version parue sur "Faces" n'est écoutable nulle part. C'est pourtant un joyau: guitare folk placide en arpèges, voix d'une profondeur sans égale, et surtout, progressivement, la mise en place d'un tapis orchestral de toute beauté. Je suis plutôt contre l'apport des orchestres dans la musique pop, et ai la dent dure tant je trouve que le plus souvent l'orchestre sert de cache misère, de caution morale quand ce n'est pas purement et simplement signe d'un caprice. Mon étalon est l'arrangement que Robert Kirby a écrit pour le "River Man" de Nick Drake, et bien trop souvent les orchestrations sont terriblement faibles en comparaison. Sur "L Ballade", les cordes et vents apportent une atmosphère mouvante et habitée proche du travail de Kirby, peut-être plus riche en timbres encore. Le morceau semble basculer dans l'onirisme, il dérive au gré des archets, mais Shawn Phillips sait le ramener sur son chemin initial, sans forcer, même si l'orchestre tente un coup de force sur la fin en laissant trainer les notes jusqu'à former un cluster défiant la mélodie vocale. Shawn Phillips attend que le calme revienne et prononce son dernier mot d'une voix plus dense, plus grave, plus sépulcrale que toutes les cordes réunies. Du grand art.

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